A bon entendeur

mardi 13 mai 2014

L'extension du domaine de la marge

Pour l'écrivain Christian Combaz, la victoire du travesti Conchita Wurst à l'Eurovision, célébré comme le triomphe de la tolérance sur les obscurantismes témoigne d'une dérive inquiétante : la promotion de la marge comme nouvelle norme. Voici un billet que j'aurai (presque) aimé écrire:
(Castro Street Fair - 1980)
" Il y a trente ans la parade de Castro Street, à San Francisco, rassemblait les travestis, les couples de bûcherons, les coiffeurs de Las Vegas et les associations LGBT pour donner une leçon aux bourgeois bien pensants, à une époque, 1982, où la population homosexuelle de l'Amérique aspirait à se rassembler pour se défendre contre la violence des honnêtes gens.

De nos jours, s'il faut en croire la rumeur, c'est la population générale de tout l'Occident qui a instauré son Castro Parade à domicile, qui défend les travestis, les bars cuir et les soirées Village People. Les médias essaient d'accréditer l'idée que les marginaux ont le soutien de la majorité par principe et que la gagnante de l'Eurovision cette année n'a révulsé personne. Or non seulement c'est faux mais c'est dangereux.

Pour qui? Pour tout le monde, mais principalement pour les gens que cela concerne au premier chef, les homosexuels qui ne portent pas de robe en lamé, ceux qui ne défilent nulle part, ceux qui ont parfois de grands enfants et se retrouvent deux fois par mois dans un bain public en sortant du bureau. Ceux là ne sont pas convaincus que l'évolution des choses en ce moment leur soit tellement favorable. Quand la marge envahit le cahier quelque chose ne va plus, et la population générale, sommée depuis trente ans de pratiquer la tolérance jusqu'à l'aplatissement, risque fort de se remettre debout. D'autant que le Tiers-monde, dont elle a largement accueilli les représentants chez elle, en vantant les mérites de leur culture au point d'en oublier la sienne, n'éprouve aucune, mais alors aucune indulgence envers les drag-queen. Il suffirait d'ailleurs de promener une grande Zoa à travers les rues de Barbès en caméra cachée pour s'apercevoir que l'angélisme de dépasse pas les grands boulevards. Alors, une fois de plus, la tolérance obligatoire, démonstrative, celle qu'on vous arrache sur tous les plateaux de télé, celle qui ressemble à un viol avec le sourire, et qui s'applique désormais à tous les sujets, risque de trébucher sur celui-ci. Des grands travestis, des homosexuels flamboyants, des personnage aux mœurs ouvertement masculines, des Jean Cocteau et des Jean Marais, des Elton John il y en a toujours eu, ils ont souvent mené une vie très publique, quand ce ne serait que le frère du roi Louis XIV, ou Frédéric de Prusse.

Mais aucun d'entre eux ne prétendait forcer l'approbation de la rue avec le secours d'une association. Désormais c'est différent, il faut absolument infliger aux gens simples le spectacle des gens compliqués, il faut faire honte aux ouvriers agricoles d'avoir des préjugés, il faut blâmer le peuple de résister à l'extension du domaine de la marge.

Le résultat de ces années de provocation , nous commençons à l'observer comme aux Etats-Unis. Trente ans après l'apparition de leur équivalent américain, ce sont ces quartiers- ghettos, (parfois de simples maisons de retraite) où les homosexuels, qui naguère encore pouvaient espérer passer inaperçus, éprouvent le besoin de se rassembler parce qu'ailleurs, ils ne se sentent plus en sécurité. "

Conchita Wurst à l'Eurovision : la marge est-elle en train de devenir la norme ? par Christian Combaz pour Figaro Vox (12/05/2014)

(ci-dessous, Castro Street Fair 2014, entre 300 000 et 400 000 participants chaque année)

Folie passagère 2279.
D'accord, pas d'accord: atoilhonneur@voila.fr

20 commentaires:

  1. marianne ARNAUD13 mai 2014, 19:09:00

    Photo du bas : dites-nous donc, mon cher Corto, où vous êtes sur cette photo ?
    O.K. je sors !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. @marianne: Quand j 'étais jeune gay et jeune con, je rêvais d'aller à la Castro Street Fair dont j avais entendu parler, je crois, dans feu le journal GayPied. Les gay prides parisiennes n existaient pas encore il me semble. Alors quand j ai lu cet article de Combaz, j ai trouvé que c'était un excellent moyen de faire le lien entre moi d'hier et moi d aujourd'hui. Toujours gay mais plus que jamais anti-communautarisme

      Supprimer
  2. marianne ARNAUD13 mai 2014, 19:44:00

    Comme pourrait l'écrire Houellebecq, mon cher Corto, c'est l'extension du domaine de la marge.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. @marianne: le titre du billet pompé dans l'article, en somme, inspiré sans nul doute de Houellebecq

      Supprimer
  3. bonsoir
    très bon papier en effet, qui confirme combien les nuages noirs s’amoncellent à l'horizon sur ce sujet là comme pour beaucoup d'autres.
    Etant moi même ancien-homo, je suis stupéfait par cette victoire de l'eurovision (et par le mariage gay)
    et par le fait qu'une une ultra minorité arrive à prendre le pouvoir à ce point.
    Car les homos sont une ULTRA minorité (je dirai maxi 3-4%)
    Ils sont désormais très loin les homos "ayant bon gout" ou "raffinés"
    Ne parlons même pas d'internet où l'on peut voir de tout sauf du romantique !

    cordialement

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. @Jmespe: les homos sont une minorité comme tout autre minorité, le pb étant que l on nous vend la defense des minorités au détriment du général. L image de la marge sur le cahier de Combaz est excellente et il y a effectivement danger à privilégier les minorités parce qu un jour ou l autre le général se met en colère voyant son "espace vital" se réduire. Tout le problème des communautarismes.
      Et je te garantis qu il n y a pas besoin d aller sur internet pour "voir", Étrangement, le réel dépasse parfois ce que l on peut voir sur internet en tant que "folie"

      Supprimer
    2. ha oui, mais mon réel est à Pau !

      Supprimer
  4. Je crois que c'est Koltchak qui avait mis sur son blog un lien vers des photos non expurgées de ce que le simple passant peut visuellement se voir infligé lors de la Castro Fair.
    Il avait prévenu, mais j'ai cliqué quand même. J'ai connu les popotes lieutenant d'un régiment Colo et mes sergents n'ont pas réussi à me faire rougir : je suis quand même pas trop bégueule.
    Mais alors ce que j'ai vu grâce à ce lien...fichtre!

    Popeye

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. @Popeye: 2 ans de coloniale pour moi ! Comme dis a Jmespe plus haut, pas besoin d aller voir les images de Koltchack, suffit d'aller aux " bons endroits" aujourd'hui encore, à Paris, Lyon, Toulouse , Annecy. la seule chose qui a évolué , si je puis dire, c'est que maintenant c'est plus confidentiel qu'avant, moins à "ciel ouvert" , ce qui est assez curieux compte tenu des discours "laxistes" et permissifs.

      Supprimer
    2. Au "5 de guerre" de la grande époque, si j'ai bien suivi?
      Arta ou Djibouti? A moins que ce ne fut le 10ème BCS...

      Supprimer
    3. @anonyme: Au 5 de la grande époque.

      Supprimer
  5. A force d'agrandir la marge, il n'y a plus de place pour le texte.
    Notre société d'aujourd'hui a donc décidé de ne plus réfléchir sur elle même, le réflexe
    pavlovien a pris le dessus, une femme à barbe c'est merveilleux, un ministre noir et
    femme qui laisse les criminels en liberté et crache sur l'hymne national c'est superbe,
    l'invasion barbare c'est le summum du bonheur...et ainsi de suite jusqu'à abrutissement
    complet.
    C'est absolument désespérant.
    Amitiés.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. @Nouratin: ce n'est pas désespérant, c'est, comme dirait Didier Goux, modernoeud ! Progressiste, c'est la marge qui fait la généralité au nom de la défense des minorités et toussa. S'élever contre c'est etre rétrograde, ringard, has been et autres qualificatifs moins policés

      Supprimer
  6. tout à fait d'accord avec votre papier.. l'image de la marge qui augmente et le texte qui rapetisse est excellente : j'ai tout compris en un éclair !

    RépondreSupprimer
  7. Quand les minorités auront pris toute la place disponible, la majorité sera moins silencieuse donc plus dangereuse;

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. @Anne et Grandpas: Et l auteur du texte a tout compris quand il parle de danger car effectivement quand la majorité silencieuse se réveillera - elle a commencé à le faire avec le mariage zinzin - elle sera en colère.

      Supprimer
  8. J'entends ce matin sur RTL qu'une manif va avoir lieu,je ne sais plus dans quel départements,tous les éleves filles et garçons,ainsi que laes profs iront à l'école en jupe:c'est contre les discriminations évidemment....putain les cons

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. @zen aztec: je demande a voir pour cette manif mais si tel était le cas: il y aura a dire autant sur ces dérives progressistes débiles que sur les parents et les profs qui donnent là dedans. les cons !

      Supprimer
  9. http://www.presseocean.fr/actualite/nantes-jupe-contre-le-sexisme-au-lycee-13-05-2014-106682
    Mais si mais si! C'est estampille Education Nationale avec logo gouvernemental et tout! On appelle officiellement les lycéens de Nantes à venir en jupe au lycée... Il faut espérer qu'il y aura une contremanifestation!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. @Zen Aztec: oh p'tain, j ai vérifié aussi, cela ressemble a tout ce qu il y a de plus vrai cette manif ! (billet suivant )

      Supprimer

La modération des commentaires étant activée, leur parution peut prendre quelques temps.

TOUT COMMENTAIRE ANONYME SERA SUPPRIME