Crash du Rio-Paris, ça fait partie des catas dont on se souvient, 200 et quelques morts, forcément, cela marque les esprits. Horreur, compassion et tristesse, passée l'heure, pour peu qu'elle puisse un jour
passer, vient le temps de fournir des explications. Le dernier
rapport du BEA vient de sortir et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il n'est pas tendre avec les pilotes et avec Air France. En gros: manque de formation y compris en situation de crise, panique à bord, un commandant absent du cockpit (pause-dodo) lors du passage
réputé difficile du trajet, amateurisme des co-pilotes, primauté donnée à l'informatique sur les réflexes, etc, etc, etc...
En lisant ces compte-rendus, je me suis dit, la vache, ils n'y vont pas par 4 chemins. Airbus veut faire porter le chapeau à Air France. C'est qu'il y a moultes pépètes en jeu. Alors pour comprendre et puisque j'ai la chance d'avoir un spécialiste aéronautique impartial (puisque désintéressé) sous le coude, j'ai voulu savoir. Mon spécialiste, ancien pilote chevronné, n'y a pas été par 4 chemins non plus.
Son rapport à lui est encore plus sévère: incident technique, certes, mais pas insurmontable ( les sondes Pitot, perte des indicateurs de vitesse ) + manque de formation + délégation de pouvoir accordée au Dieu informatique + absence du commandant au moment crucial + panique par manque de savoir-faire + panique tout court = la catastrophe !
Comme tu y vas, lui ai-je dit. Tiens, tais-toi et lis, me rétorqua-t-il. Et me voilà à lire les dernières minutes de conversation entre les pilotes. C'est édifiant ! Et si, il n'y avait pas eu morts d'hommes, on en rirait presque.
Cela se passe entre 1h 55 mn 57 secondes et 2h 14mn et 27 secondes du matin, entre Rio et Paris. Dans la première séquence, le co-pilote et son acolyte s'aperçoivent qu'il y a un problème avec l'indicateur de vitesse, ils traversent une zone de turbulence bien connue. Le commandant de bord, en repos, n'est pas dans le cockpit.
- Bon, ben, il n'y a plus qu'à le réveiller [le commandant], hein, c'est ça ?
- Moins 42°, on utilisera pas les anti ice, c'est toujours ça de pris.
- Je suis d'accord qu'on est en manuel, c'est ça , hein ?
- Ah non, on est en calibré, hein ?
- Voila, je te réduis un peu !
- Tu veux qu'on mette sur start?
- Qu'est-ce que c'est que ça ?
- On n'a pas une bonne annonce de vitesse.
- On a perdu les, les, les vitesses alors ?
- Selon les trois [indicateurs], tu montes, donc tu redescends !
- Bon, il vient ou pas ? (le commandant)
Un peu plus tard, le commandant est revenu.
- On a pourtant les moteurs, qu'est-ce qui se passe ?
- Eh, qu'est-ce que vous faîtes ? dit le commandant de retour.
- Je ne sais pas ce qui se passe. (le copilote)
- Je n'ai plus d'indication. (copilote)
- Qu'est-ce que tu en penses ?, qu'est-ce qu'il faut faire?
- Tu montes, tu descends, descends, descends. (copilote)
- Non tu montes là. (commandant)
- Là, je monte okay, alors on descend. (copilote)
- ... c'est pas possible. (commandant)
- Ouais, ouais, ouais, j'descends là ou non ? (copilote)
- Là, tu descends.
....
- Non, non, ne remonte pas. ( commandant )
- Alors, descends.
- Attention, tu cabres là ! (commandant)
- Ben, il faudrait, on est à 4000 pieds (copilote)
- Allez, tire ! (commandant)
- Allez,on tire, on tire, on tire, on tire (copilote)
.................. enregistrement interrompu..................
228 morts.
Je demande à mon spécialiste, mais alors qu'aurait-il fallu faire? Réponse lapidaire: Le commandant n'aurait jamais du être en repos à ce moment du trajet et savoir quoi faire, comment réagir lorsque l'informatique déconne.
Mais était-il possible de réagir ?
Oui.
Folie passagère 767.