La Grèce est un sujet à la mode. Parce que la dette, parce que l'austérité, parce que la Troïka, parce que l'Europe et l'euro, parce que Tsipras et Syriza, bien sûr !
Alors quand il y a un reportage dans la lucarne ou dans un magazine sur la Grèce, j'écoute ou je lis et si je ne comprends pas, j'appelle mon frère qui vit là-bas depuis... si longtemps. Aujourd'hui, c'était sur le port du Pirée. Il paraît que la situation est très tendue entre les ouvriers grecs, les dockers, et les propriétaires de la moitié du Pirée: des Chinois; forcément de méchants Chinois. Ils ont même parlé de "guerre froide ", c'est vous dire...
C'est alors que je me suis souvenu du moment où je travaillais avec un fournisseur grec, en 2007-2008. Allez savoir pourquoi, ce type que je n'ai jamais rencontré autrement que par téléphone avait à l'époque les meilleurs prix du marché européen pour tout ce qui était câbles électriques, toutes puissances confondues. Je n'ai jamais trop su comment il les négociait, je voyais juste des certificats d’origine provenant de Russie, de Hongrie, de France, de Pologne, d'Allemagne ou d'Autriche, parfois même de Chine... Toujours est-il que je lui en achetai des quantités industrielles pour un chantier que nous avions à Chypre. Chypre qui comme chacun le sait est à quelques encablures du Pirée et qu'entre les deux, point de ponts, il est donc nécessaire de recourir au fret maritime.
Mes câbles, selon leurs grosseurs et leur longueurs, voyageaient par containers, pour les plus petits, sur des gros tourets pesant parfois plusieurs tonnes, pour les autres, le tout étant chargé sur des ferries ou des cargos. Départ: Le Pirée, arrivée: Principalement Limassol, parfois Larnaka.
Les relations avec mon fournisseur étaient extraordinaires lorsque nous parlions prix, normal, il avait les meilleurs, bien mieux que ceux du numéro 1 Français Nexans. Exécrables lorsqu'il s'agissait de les acheminer. Il y avait toujours un truc: un bateau qui ne partait pas, un container bloqué pour on ne sait quelles raisons, un portique HS, un jour chômé ou plus fréquemment un mouvement de grève des dockers grecs. Ainsi, fréquemment, mes câbles impatiemment attendus sur le chantier loupaient la navette. Je me souviens même qu'il fallut quelques fois réexpédier mes câbles du Pirée à Gênes pour les ré-acheminer à Chypre, moyennant surcoût conséquent. Il y eut même, une fois, des câbles autrichiens que je pus expédier à Chypre en passant par... Barcelone ! Et moi, je me prenais les engueulades à répétition du chef de chantier et donc de mon boss et donc du boss de mon boss. Et à chaque retard, des pénalités dressées par notre client et ma consommation de cigarettes qui progressait proportionnellement...
Et puis vint le jour où des Chinois achetèrent la moitié du port du Pirée pour près de 4 milliards d'euros, la Grèce, en pleine déconfiture, bradait ses bijoux de famille. Mon boss déboula dans mon bureau. Il me demanda s'il ne fallait pas trouver un autre fournisseur afin d'éviter une rupture d'approvisionnement, avec des Chinois, on est à l'abri de rien, disait-il. J'appris plus tard que Nexans le caressait financièrement dans le sens du portefeuille. Aussitôt, j'appelais mon Grec. Celui-ci me rassura - j'avais confiance, il ne m'avait jamais empapaouté celui-là - vous verrez me dit-il, avec les Chinois, cela ne pourra pas être pire qu'avec les Grecs !
Il avait raison. il ne fallut pas un mois pour que les Chinois mettent les choses au carré; plus jamais, jusqu'à la fin du chantier, je n'eus le moindre retard de livraison. L’achèvement des travaux se passa tranquillement et je touchais ma prime de " bonne fin ".
Du pire, les Chinois avaient fait le Pirée. Le plus drôle dans cette histoire, c'est que le donneur d'ordre de cet énorme chantier, actionnaire majoritaire des futurs bâtiments, était un consortium... grec !
Lorsque, enfin, je réussis à aller à Chypre, je n'eus qu'à constater que tous ces gens-là étaient fort satisfaits de la passation sous pavillon chinois de la moitié du Pirée. Comme quoi...
Il serait dommage que Syriza casse la baraque; Gênes, Marseille ou Toulon n'attendent que cela.
En 6 ans, de 2008 à 2014, le nombre de containers traités au Pirée, 3 millions d'unités, a augmenté de 500% !
Alors quand il y a un reportage dans la lucarne ou dans un magazine sur la Grèce, j'écoute ou je lis et si je ne comprends pas, j'appelle mon frère qui vit là-bas depuis... si longtemps. Aujourd'hui, c'était sur le port du Pirée. Il paraît que la situation est très tendue entre les ouvriers grecs, les dockers, et les propriétaires de la moitié du Pirée: des Chinois; forcément de méchants Chinois. Ils ont même parlé de "guerre froide ", c'est vous dire...
C'est alors que je me suis souvenu du moment où je travaillais avec un fournisseur grec, en 2007-2008. Allez savoir pourquoi, ce type que je n'ai jamais rencontré autrement que par téléphone avait à l'époque les meilleurs prix du marché européen pour tout ce qui était câbles électriques, toutes puissances confondues. Je n'ai jamais trop su comment il les négociait, je voyais juste des certificats d’origine provenant de Russie, de Hongrie, de France, de Pologne, d'Allemagne ou d'Autriche, parfois même de Chine... Toujours est-il que je lui en achetai des quantités industrielles pour un chantier que nous avions à Chypre. Chypre qui comme chacun le sait est à quelques encablures du Pirée et qu'entre les deux, point de ponts, il est donc nécessaire de recourir au fret maritime.
Mes câbles, selon leurs grosseurs et leur longueurs, voyageaient par containers, pour les plus petits, sur des gros tourets pesant parfois plusieurs tonnes, pour les autres, le tout étant chargé sur des ferries ou des cargos. Départ: Le Pirée, arrivée: Principalement Limassol, parfois Larnaka.
Les relations avec mon fournisseur étaient extraordinaires lorsque nous parlions prix, normal, il avait les meilleurs, bien mieux que ceux du numéro 1 Français Nexans. Exécrables lorsqu'il s'agissait de les acheminer. Il y avait toujours un truc: un bateau qui ne partait pas, un container bloqué pour on ne sait quelles raisons, un portique HS, un jour chômé ou plus fréquemment un mouvement de grève des dockers grecs. Ainsi, fréquemment, mes câbles impatiemment attendus sur le chantier loupaient la navette. Je me souviens même qu'il fallut quelques fois réexpédier mes câbles du Pirée à Gênes pour les ré-acheminer à Chypre, moyennant surcoût conséquent. Il y eut même, une fois, des câbles autrichiens que je pus expédier à Chypre en passant par... Barcelone ! Et moi, je me prenais les engueulades à répétition du chef de chantier et donc de mon boss et donc du boss de mon boss. Et à chaque retard, des pénalités dressées par notre client et ma consommation de cigarettes qui progressait proportionnellement...
Et puis vint le jour où des Chinois achetèrent la moitié du port du Pirée pour près de 4 milliards d'euros, la Grèce, en pleine déconfiture, bradait ses bijoux de famille. Mon boss déboula dans mon bureau. Il me demanda s'il ne fallait pas trouver un autre fournisseur afin d'éviter une rupture d'approvisionnement, avec des Chinois, on est à l'abri de rien, disait-il. J'appris plus tard que Nexans le caressait financièrement dans le sens du portefeuille. Aussitôt, j'appelais mon Grec. Celui-ci me rassura - j'avais confiance, il ne m'avait jamais empapaouté celui-là - vous verrez me dit-il, avec les Chinois, cela ne pourra pas être pire qu'avec les Grecs !
Il avait raison. il ne fallut pas un mois pour que les Chinois mettent les choses au carré; plus jamais, jusqu'à la fin du chantier, je n'eus le moindre retard de livraison. L’achèvement des travaux se passa tranquillement et je touchais ma prime de " bonne fin ".
Du pire, les Chinois avaient fait le Pirée. Le plus drôle dans cette histoire, c'est que le donneur d'ordre de cet énorme chantier, actionnaire majoritaire des futurs bâtiments, était un consortium... grec !
Lorsque, enfin, je réussis à aller à Chypre, je n'eus qu'à constater que tous ces gens-là étaient fort satisfaits de la passation sous pavillon chinois de la moitié du Pirée. Comme quoi...
Il serait dommage que Syriza casse la baraque; Gênes, Marseille ou Toulon n'attendent que cela.
En 6 ans, de 2008 à 2014, le nombre de containers traités au Pirée, 3 millions d'unités, a augmenté de 500% !
Folie passagère 2658.
D'accord, pas d'accord: atoilhonneur@voila.fr
Il faudrait céder le port de Marseille aux chinois !
RépondreSupprimerEt faire croire aux Chinois que les "cou...es" d'islamistes sont aphrodisiaques !
Supprimer@ Jacques Etienne
SupprimerC'est vrai ça ! Mais pour l'instant c'est l'aéroport de Toulouse-Blagnac qui les intéresse.
Petite question : comment fait-on pour faire des E avec accent aigu ?
@jacques Etienne: En voila une idée qu elle serait bonne, je suis même sur que Macron secrètement y a pensé :)
Supprimer@marianne: Toulouse, c'est fait, es Chinois en sont maîtres; au suivant !
Supprimerpour le E avec accent, c'est via le correcteur d orthographe
Marianne prenez un Mac É :-)
SupprimerJean-Laurent est là, mon cher Corto, et la réponse c'est Alt 0201 É
Supprimermarianne ARNAUD
SupprimerÉ : Appuyez sur la touche Alt et tapez 144
Le club Med, c'est fait aussi !
SupprimerCodes ASCII
Supprimerhttp://www.letoileauxsecrets.fr/ascii/Altcode.html
AVIS ! Non mais dites donc , je vous raconte ma vie et vous n'avez rien de mieux que de vous interroger sur les E avec ou sans accent ? A quoi cela sert-il que je me décarcasse ? hein, franchement ?
SupprimerIl me semble que les majuscules ne prennent pas d'accent.
SupprimerEt ton frère, alors, qu'en dit et pense-t-il, de tout ça ? Bonne fin de semaine ami Corto :)
RépondreSupprimer@Al West: ce qu il en pense ? et bien que ça ne sert a rien de tout mettre sur le compte de la Troika ou des ex-z'élites, la totalité du peuple grec est responsable de ce bordel et il commence à payer maintenant à payer des impots ce qu il n avait jamais fait auparavant.
SupprimerPour le erste, il est comme 64 ou 65% des Grecs, il n' a pas voté pour Syriza.
Les Grecs ont profité de l'argent emprunté. Certains certainement beaucoup plus que d'autres. La question est: rembourseront-ils ou est-on reparti pour un tour de rééchelonnement, d'annulation partielle et de menace de défaut?
RépondreSupprimer@Pangloss: ils en rembourseront une partie, une petite partie mais en attendant, on leur accordera des délais supplémentaires, délais qu on n a jamais accordé à l Espagne, l Italie, le Portugal ou encore l Irlande. Les grecs, du moins 35% d entre eux, ont compris que Syriza pouvait faire peur. C'est aussi simple que cela.
Supprimermerci pour cette succulente histoire
RépondreSupprimeranne
@anne! merci, je t en suis gré
SupprimerMerci pour cette nouvelle tranche de vie !
RépondreSupprimerUn p'tit coup de jeune votre histoire Corto ! Je me souviens des années 80 ou nous avons commencé
RépondreSupprimerà travailler par camion et bateaux avec les Grecs : ils étaient certes gentils - et très habiles commerçants - mais
pour se faire payer ... J ' ai parfois du aller la-bas pour gueuler , tempêter , menacer , hurler pour essayer d ' encaisser
les voyages dus : ) Pas toujours avec succès . J ' en garde un souvenir de voyous , sympas , mais désagréables
par ce côté pirate .
Jérôme
Hi, I read your new stuff like every week.
RépondreSupprimerYour writing style is witty, keep doing what you're doing!
Have a look at my page EmmettRKaehler