vendredi 26 mai 2017

Quelque chose bout dans la marmite...

Je vais peut-être passer pour un idiot auprès de quelques-uns (Coucou La Plume), mais je viens seulement de découvrir la revue Eléments pour la civilisation européenne. C'est tout simplement passionnant et tout à fait original. Vous trouverez ci-dessous l’éditorial d'Alain de Benoist.


" L’élection présidentielle de 2017 s’est déroulée dans un climat lamentable de part en part et s’est achevée sur un face-à-face calamiteux. Au second tour, un candidat et une candidate s’affrontaient. Le premier a été élu par défaut, par des gens qui ne voulaient pas de lui, mais voulaient encore moins de son adversaire (le « barragisme », nouvelle dénomination du « vote utile »). Aucun enjeu civilisationnel n’a été abordé. Et pourtant, ce scrutin revêt un caractère historique.


Aucun des deux grands partis qui ont en alternance gouverné la France depuis près d’un demi-siècle n’a pu accéder au second tour. En France comme ailleurs, la vieille classe politique est discréditée, ce qui laisse prévoir une recomposition générale du paysage politique dans un climat plus ou moins convulsif qui débouchera sans doute sur des regroupements inédits. 

Les anciens grands partis éliminés au premier tour étaient aussi ceux qui étaient porteurs du clivage gauche-droite – ce qui leur permettait de mener alternativement la même politique – et aussi ceux qui étaient identifiés comme ses représentants. À l’inverse, les deux finalistes avaient comme point commun de ne pas se définir par rapport à lui et de ne pas voir dans le couple gauche-droite l’alpha et l’oméga de la politique. Ils étaient en ce sens le miroir l’un de l’autre. L’un opposait les « conservateurs » aux « progressistes », l’autre les « patriotes » aux « mondialistes », mais c’était la même chose. Conçu à l’intention des classes moyennes, qui sont en train de s’effacer, le clivage gauche-droite constituait un axe horizontal qui est aujourd’hui remplacé par un axe vertical. Il réapparaîtra peut-être à l’avenir, mais ce sera avec un autre contenu. 

Cette élection a également fait réapparaître un clivage de classe que certains croyaient disparu. « Le clivage de classes aura rarement été aussi net », observe Régis Debray. D’un côté, les hauts et très hauts revenus, les élites appartenant à la Caste, les cadres supérieurs et la grande bourgeoisie, les « auto-entrepreneurs » et les bobos, de l’autre les revenus bas ou modestes, les chômeurs, les ouvriers et les agriculteurs, les couches inférieures des classes moyennes, tous ceux qui ne vivent plus là où se créent les emplois et s’accumule la richesse. D’un côté, les habitants des grandes métropoles, de l’autre la « France périphérique » des villes moyennes, des zones péri-urbaines désindustrialisées et des communes rurales. D’un côté, les « planétaires », tenants d’une France open space « ouverte sur le monde », la main sur le portefeuille quand ils chantent l’hymne national, de l’autre un peuple désireux de perpétuer son patrimoine immatériel, de conserver sa sociabilité propre et de rester souverain sur les conditions de sa reproduction sociale. Les gagnants et les perdants de la mondialisation. Le « parti de demain » et le parti de toujours. Les « people » et le peuple.

Grâce à cette élection, la classe dominante reconstitue son unité politique contre « ceux d’en bas », derrière les marcheurs du marché, followers et majorettes, menés par un enfant-roi télévangéliste dépourvu d’affects, mais impatient d’instaurer définitivement la société liquide dont rêve la communauté financière qui l’a adoubé. 

La France n’est pas seulement divisée, fragmentée, coupée en deux. Elle se compose d’individus et de groupes sociaux qui ne vivent pas la même réalité, qui ne voient pas les mêmes choses, qui ne respirent pas le même air et ne parlent pas le même langage. La France d’en haut et la France d’en bas sont devenues également étrangères au « vivre ensemble ». Elles ne vivent même plus côte-à-côte. Elles vivent face à face. Le rôle normal du politique est de produire du commun, d’organiser un espace commun. Mais le politique a oublié sa vocation naturelle. Plus on parle de « société inclusive », plus la fragmentation progresse. 

Le seul mérite de cette situation est d’éclaircir les fronts. On sait mieux désormais qui se fait face : les libéraux et les antilibéraux. On sait aussi que la misère sociale, la frustration, la défiance et la colère sont là et qu’elles vont encore s’étendre. Un feu s’est allumé, prêt à enflammer la plaine. Quelque chose bout dans la marmite. Toute la question est de savoir quand elle explosera. Et qui profitera de l’explosion."

Au sommaire de ce numéro 166:

Dossier : le conservatisme au féminin
• Rencontre avec Bérénice Levet
• Les insoumises : En marche !
• Entretien avec Eugénie Bastié, Solange Bied-Charreton, Natacha Polony et Ingrid Riocreux
• Marcela Iacub, pour le meilleur et pour le pire
• Interview de Marion Maréchal-Le Pen : « gagner avant tout le combat culturel »

Et aussi...
• Emmanuel Macron, uber-président
• La droite buissonnière
• L’AfD ou les spécificités du populisme allemand
• On a retrouvé les Indo-Européens
• Entretien avec Thibault Isabel : le retour de Proudhon
• Michel Onfray, lecteur de Proudhon
• Jean-François Davy, un vrai cinéma populiste
• Vladimir Dimitrijevic, le feu sacré du verbe
• Georges Hyvernaud, l’ivrogne et l’emmerdeur
• Ce que penser veut dire, le dernier livre d'Alain de Benoist
• Dernières rencontres avec Armand Gatti
• Matthew B. Crawford, le philosophe et les motos...

(Billet non sponsorisé)

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D'accord, pas d'accord: atoilhonneur@yahoo.fr

24 commentaires:

  1. Je lis régulièrement cette bonne revue. Je ne suis pas toujours d'accord avec ses analyses, mais changement d'herbage réjouit les veaux. L'article sur les Indo-Européens me paraît un peu bizarre.

    Le Nain

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    1. Le Nain: effectivement tout n'set pas parfait, mais j aime bien.

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  2. Je ne connaissais pas non plus cette revue mais vous m'avez donné envie de la lire.
    Je m'y mets dès demain. Merci !:)

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  3. Tu as de très bonnes lectures.

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  4. "D’un côté, les hauts et très hauts revenus, les élites appartenant à la Caste, les cadres supérieurs et la grande bourgeoisie, les « auto-entrepreneurs » et les bobos, de l’autre les revenus bas ou modestes, les chômeurs, les ouvriers et les agriculteurs, les couches inférieures des classes moyennes, tous ceux qui ne vivent plus là où se créent les emplois et s’accumule la richesse"

    N'en a-t-il pas toujours été ainsi ?

    Albert

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  5. marianne ARNAUD26 mai 2017, 20:31:00

    "Quelque chose bout dans la marmite" mais le marmiton en chef pense qu'il en fera son affaire, mon cher Corto !
    En attendant les Français vont lui donner sa majorité absolue puisque certains naïfs croient encore en une opposition des LR.
    Effectivement, dans l'avenir nous pourrions aller vers un vote de classe, mais je crains que cela ne soit pas encore pour cette fois-ci, tant notre mirobolant est éblouissant à l'étranger.

    P.S. Je connaissais aussi cette revue qu'une de mes amies m'apportait assez régulièrement.

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    1. marianne: l euphorie médiatique pro-macron est proprement hallucinante ! Le Pompon, bien sûr, décerné à BFM. Majorité absolue, je demande à voir. Il va cartonner, c'est certain mais absolue...

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    2. BFM c'est le pompon......et ça continue!

      Je note que la grande bringue du WE sur TF1 n'est pas en reste!

      J'ai capté ça ce midi "Le couple présidentiel qui est peut être entrain de changer l'image de la France..." et blablabla sur la presse étrangère .......
      Alors là, il faut pouvoir dire une ânerie de la sorte!
      Lisa

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  6. C'est la seconde fois que j'entends parler de "la société liquide", la première fois, c'était Finkie qui s'y collait. Merci pour ce rappel, je vais rechercher cette revue. Les plumes, j'en connais déjà une partie.

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    1. Al West: excellente revue de même que Sharp, je me régale

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    2. Ravi que Sharpe te plaise (j'avais noté que tu l'as mis en "lecture en cours".) J'en ai tout un rayon en magasin -bien que bon nombre soit déjà prêté, mais que je compte bien récupérer.

      Je plussoie ton avis sur Eléments : acheté ce matin, déjà bien descendu.

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  7. Très bonne revue de haute tenue. Le catholique que je suis tique sur une certain tropisme néo-païen qui transparaît parfois, mais le niveau intellectuel rattrape le tout.

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    1. Koltchack:c'est vrai que un peu comme Institut Iliade, c'est un brin néo-païen, mais bon, je leur concède ça.

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  8. C'est une très bonne revue, j'y suis abonnée depuis plus d'un an. Articles de fond et non jacasseries basées sur l'émotionnel, voici une alternative rafraîchissante à la pensée unique et à son corollaire inévitable, le Padamalgam.

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  9. Et pendant ce temps, les choses sérieuses se passent ici :

    http://tempsreel.nouvelobs.com/chroniques/20170524.OBS9848/comment-la-chine-transforme-la-mondialisation.html

    Albert

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  10. Moi, tout ça m'indiffère. La seule chose qui compte, c'est la poignée de mains entre Trump et Macron. Là, on est dans le Grand, dans le symbole!
    La preuve, tous les média en parlent et reparlent et reparlent encore...

    Le Page.

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  11. Bonjour Corto (et Koltchack, et Marc qui saura être clément, j'en suis convaincu!)
    Je suis abonné à cette revue depuis 2ans et à la NRH depuis plus longtemps pour De Benoist et feu Venner qui sont brillants, qui écrivent de bien belle manière et qui ne sont pas des révisionnistes au service du système officiel moderne.
    Je me suis régalé à la lecture de ce dernier numéro et notre ami Paul Fortune se voit honorer par un article dans un précédent numéro (il y a plusieurs mois).
    Ravi de ta découverte et le paganisme est loin d'être rédhibitoire.
    Amitiés.

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    1. Lebuchard: Bonjour toi !
      Oui une bien belle découverte en ce qui me concerne, et vraiment pas grand chose à jeter dans ce dernier numéro.
      A bientôt

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    2. J'ai vu quelques clichés d'une récente petite sauterie entre nauséabonds... j'ai regretté de ne pas être parisien (c'est dire !!... ;-) ) ce jour là.
      En plus, il y avait avec la charmante Danielle et André Pousse , les deux comparses sus-citès ! Dommage !

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    3. Lebuchard: et ces deux là ne s'arrangent pas, ils ont même conquis mon paternel, c'est dire :)

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  12. Je découvre une revue qui permettra enfin d'aller ailleurs que sur le net pour obtenir de l'information et de la réflexion. J'espère juste qu'un marchand de journaux la vendra, dans ma province !

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